Structure sociale et politique
Le double État polono-lituanien, Respublica, ou « Commonwealth » (en polonais: Rzeczpospolita), était l’un des plus grands États d’Europe. Alors que la Pologne au milieu du 16ème siècle occupait une superficie d’environ 100 000 miles carrés (260 000 km carrés), avec quelque 3,5 millions d’habitants, le Commonwealth à son point le plus important au début du 17ème siècle comprenait près de 400 000 miles carrés et environ 11 millions d’habitants. En tant que tel, c’était un pays multiethnique habité par des Polonais, des Lituaniens, des Ruthènes, des Allemands, des Juifs et un petit nombre de Tatars, d’Arméniens et d’Écossais. C’était aussi un pays multiconfessionnel, avec des Catholiques Romains, des Protestants, des Orthodoxes Orientaux, des Juifs et des Musulmans vivant à l’intérieur de ses frontières. Certaines communautés vivaient sous leurs propres lois; les Juifs, par exemple, jouissaient de l’auto-administration par le Conseil des Quatre Terres.
Le terme Pologne était utilisé à la fois pour l’ensemble de l’État et pour la partie strictement polonaise de celui-ci (bien que ce dernier soit officiellement appelé Couronne). Cela pourrait être déroutant. Il manquait un terme supranational comme « britannique ». Le Commonwealth est progressivement dominé par la szlachta, qui considère l’État comme une incarnation de ses droits et privilèges. Allant des yeomen sans terre les plus pauvres aux grands magnats, les szlachta insistaient sur l’égalité de tous ses membres. En tant que nation politique, elle était plus nombreuse (8 à 10%) que l’électorat de la plupart des États européens, même au début du XIXe siècle.
Dans la majeure partie de l’Europe, le système médiéval de domaines a évolué vers l’absolutisme, mais dans le Commonwealth, il a conduit à une démocratie szlachta inspirée des idéaux de la Rome antique, à laquelle des parallèles ont constamment été établis. La szlachta en vint à voir dans son État un modèle constitutionnel parfait, un grenier à blé pour l’Europe et un rempart contre la barbarie orientale. Ses faiblesses inhérentes aux finances, à l’administration et à l’armée ont été ignorées.
La fin de la dynastie jagellonne signifiait le début de l’élection sans restriction au trône. Le premier roi a élu viritim (i.e., par vote direct de la szlachta) était Henri de Valois, le frère du roi de France. Lors de son accession au trône (règne 1573-74), qu’il abandonne rapidement pour devenir Henri III de France, il accepte les articles dits Henriciens et Pacta Conventa. Présenté désormais à chaque nouveau roi comme un contrat avec la noble nation, l’ancien document prévoyait l’élection libre (mais pas du vivant du monarque régnant), la paix religieuse, les réunions bisannuelles du Sejm (avec un corps permanent de sénateurs actifs dans l’intervalle) et le droit de renoncer à l’allégeance au roi s’il rompait le contrat.