Martial

Le succès de ses compatriotes a peut-être motivé Martial à s’installer à Rome, en provenance d’Hispanie, une fois ses études terminées. Ce mouvement s’est produit en l’an 64. Sénèque le Jeune et Lucan ont peut-être été ses premiers mécènes, mais cela n’est pas connu avec certitude.

On ne sait pas grand-chose des détails de sa vie pendant les vingt premières années environ après son arrivée à Rome. Il a publié quelques poèmes de jeunesse dont il pensait très peu dans ses dernières années, et il se moque d’un libraire insensé qui ne les laisserait pas mourir de mort naturelle (I. 113). Sa faculté mûrit avec l’expérience et avec la connaissance de cette vie sociale qui fut à la fois son thème et son inspiration; beaucoup de ses meilleures épigrammes sont parmi celles écrites dans ses dernières années. De nombreuses réponses qu’il fait aux remontrances de ses amis — entre autres à celles de Quintilien — on peut en déduire qu’il a été incité à pratiquer au barreau, mais qu’il préférait sa propre vie paresseuse, certains diraient bohème. Il s’est fait de nombreux amis et mécènes influents et a obtenu la faveur de Titus et de Domitien. Il obtint d’eux divers privilèges, entre autres le semestris tribunatus, qui lui conférait le rang équestre. Martial a échoué, cependant, dans sa demande à Domitien pour des avantages plus substantiels, bien qu’il commémore la gloire d’avoir été invité à dîner par lui, et aussi le fait qu’il a procuré le privilège de citoyenneté à de nombreuses personnes au nom desquelles il a fait appel à lui.

La première de ses œuvres existantes, connue sous le nom de Liber spectaculorum, a été publiée pour la première fois à l’ouverture du Colisée sous le règne de Titus. Il se rapporte aux représentations théâtrales données par lui, mais le livre tel qu’il est actuellement a été publié vers la première année de Domitien, c’est-à-dire vers l’an 81. La faveur de l’empereur lui procura le visage de certaines des pires créatures de la cour impériale — parmi lesquelles le célèbre Crispinus, et probablement de Paris, l’auteur supposé de l’exil de Juvénal, pour lequel Martial écrivit ensuite une épitaphe élogieuse. Les deux livres, numérotés par les éditeurs XIII et XIV, connus sous les noms de Xenia et Apophoreta — inscriptions en deux lignes chacune pour les cadeaux — ont été publiés aux Saturnales de 84. En 86, il produit les deux premiers des douze livres sur lesquels repose sa réputation.

De cette époque jusqu’à son retour en Hispanie en 98, il publia un volume presque chaque année. Les neuf premiers livres et la première édition du Livre X sont apparus sous le règne de Domitien; Le Livre XI. est apparu à la fin de 96, peu de temps après l’accession de Nerva. Une édition révisée du livre X, celle que nous possédons maintenant, parut en 98, à l’époque de l’entrée de Trajan à Rome. Le dernier livre a été écrit après trois ans d’absence en Hispanie, peu de temps avant sa mort vers l’an 102 ou 103.

Ces douze livres nous présentent le mode de vie ordinaire de Martial entre l’âge de quarante-cinq et soixante ans. Sa maison habituelle pendant trente-cinq ans était l’agitation de la Rome métropolitaine. Il habitait d’abord en haut de trois volées d’escaliers, et son « grenier » surplombait les lauriers devant le portique d’Agrippa. Il avait une petite villa et une ferme improductive près de Nomentum, dans le territoire sabin, où il se retirait occasionnellement de la peste, des bourreaux et des bruits de la ville (ii.38, xii.57). Dans ses dernières années, il avait également une petite maison sur le Quirinal, près du temple de Quirinus.

Au moment de la parution de son troisième livre, il s’était retiré pour une courte période en Gaule cisalpine, fatigué, comme il nous le dit, de sa fréquentation peu rentable des gros bonnets de Rome. Pendant un temps, il semble avoir senti le charme des nouvelles scènes qu’il a visitées, et dans un livre ultérieur (iv. 25) il envisage la perspective de se retirer dans le quartier d’Aquilée et du Timavus. Mais le sort exercé sur lui par Rome et la société romaine était trop grand; même les épigrammes envoyées du Forum Corneli et de la Voie Émilienne sonnent beaucoup plus du forum romain, et des rues, des bains, des portiques, des maisons closes, des étals de marché, des maisons publiques et des clubs de Rome, que des lieux d’où elles sont datées.

Son départ définitif de Rome a été motivé par une lassitude des charges que lui imposait sa position sociale, et apparemment les difficultés de faire face aux dépenses ordinaires de la vie en métropole (x. 96); et il attend avec impatience un retour aux scènes familières à sa jeunesse. L’épigramme bien connue adressée à Juvénal (xii.I 8) montre que pendant un temps son idéal s’est heureusement réalisé; mais l’évidence de l’épître en prose préfixée au Livre XII prouve et qu’il ne pouvait vivre heureux loin des plaisirs littéraires et sociaux de Rome longtemps. La seule consolation de son exil était une dame, Marcella, dont il écrit plutôt platoniquement comme si elle était sa patronne — et il semble avoir été une nécessité de sa vie d’avoir toujours une patronne ou une patronne — plutôt que sa femme ou sa maîtresse.

Au cours de sa vie à Rome, bien qu’il n’ait jamais atteint une position d’indépendance réelle, il semble avoir connu de nombreux écrivains de l’époque. Outre Lucan et Quintilien, il comptait parmi ses amis Silius Italicus, Juvénal et Pline le Jeune. Le silence que lui et Statius, bien que les auteurs écrivant en même temps, ayant des amis communs, entretiennent l’un envers l’autre, peut s’expliquer par une aversion mutuelle. Martial montre en de nombreux endroits un mépris non dissimulé pour le genre d’épopée artificielle sur lequel repose principalement la réputation de Statius; et il est possible que l’auteur respectable de la Thébaïde et des Silvae ait peu d’admiration pour la vie ou les œuvres de l’épigrammatiste de Bohême.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.